On vieillit chaque année, pourtant changer de dizaine reste un cap. Pourquoi ce cap peut s’avérer si difficile pour certaines et futile pour d’autres ? Est-ce vraiment une question de nombre de bougies sur un gâteau ? Que se cache t-il derrière toutes ces choses qui nous empêchent de célébrer nos anniversaires ? C’est parti, on explore.
Il y a quelques jours j’ai eu 30 ans, c’est étonnant mais j’avais l’impression de les avoir déjà. Depuis un an à peu près, mes 29 ans étaient occultés par les « ahhhh l’année prochaine, c’est 30 ! » sourire en coin en guettant ma réaction. J’ai vu mes amis avoir 30 ans avant moi, cette année j’ai célébré mes camarades d’école. Certains se fichaient pas mal de cette nouvelle dizaine qui démarrait pour eux, d’autres ne voulaient même pas en parler. Et moi au milieu de tout ça, j’étais un mélange d’impatience et d’indifférence.
Depuis mon plus jeune âge j’associe la trentaine à la liberté, c’est comme être jeune mais avec plus d’argent. Débarrassés de nos traits juvéniles, véritablement indépendants, encore fougueux mais plus chiens fous, capable de comprendre une conversation d’ados comme les questions des anciens. Avoir 30 ans c’est être jeune avec de l’expérience, c’est gérer des questions d’adultes, penser à faire sa déclaration d’impôts et acheter de temps en temps des Haribos.
On voit souvent trainer sur les réseaux sociaux des posts qui nous rappellent que c’est OK pour une femme d’avoir 30 ans, être célibataire, pas d’enfant, pas propriétaire… Je ne suis pas vraiment adepte de ce genre de posts tant ils me glissent dessus. Il est vrai qu’il y a un siècle on aurait parlé de « vieille fille » une expression aussi ignoble que les jugements de celles et ceux qui continuent de l’utiliser de nos jours. Les femmes du 21ème siècle, qui me précèdent, m’accompagnent et me suivront sont libres d’incarner et se réaliser dans ce qu’elle souhaitent. Plus elles sont libres, et plus elles sont inspirantes. Certaines bâtissent des empires ou rénovent des maisons, qu’elles sauvent des vies ou donnent la vie, s’unissent, s’émancipent… Une femme est puissante quand elle s’incarne dans sa nature profonde et non en miroir des discours sociétaux plus ou moins fossilisés. J’ai une affection particulière pour celles qui ne se justifient de rien, de l’admiration pour les « première femme à », un respect immense pour toutes celles qui oeuvrent chaque jour à s’affirmer un peu plus dans leur vérité.
Lors de mon passage à la trentaine j’ai pris le temps de me faire couler un bain et y inviter toutes les versions de moi à des âges différents. Ok, ça à l’air perché comme ça, mais pas tant que ça. Quand j’avais 10 ans, 20 ans, quand j’en aurai 40, 60, 80… J’ai toujours été fasciné par les ponts par dessus les années, croyant fermement qu’on peut avoir accès à toutes ces parts de nous depuis notre esprit. Je me suis demandé ce qu’elles penseraient, ce qu’elles me diraient, leurs conseils, leurs désirs. Comment mettre leur insouciance et expérience au service de la vie que je mène ici et maintenant. Aussi étrange que puisse paraitre ce petit rituel que je vous partage, il fait un bien fou. Se donner la parole à soi plutôt qu’au monde est toujours une bonne idée.
Quand on a trente ans, l’âge n’est véritablement qu’un chiffre, sans inconvénient ni privilège. On a plus le droit au menus enfants, plus de réduction SNCF, on est clairement assez vieux pour rentrer en boite de nuit, assez jeune pour rentrer dans un EPHAD sans risquer d’être pris pour un résident, nos mutuelles n’ont pas encore explosé, et on ne parle pas encore de nos retraites. 30 ans vu comme cela, c’est finalement très neutre. Alors de nos trentaines, faisons en ce qui nous rendra heureux dans l’instant, ce qui aurait fait rêver les enfants qu’on était, ce qui nous rendra fiers quand on sera vieux. Dans le fond, ce n’est qu’un bon moment à passer.