Le temps nourrit il vraiment nos liens ? 

Est ce qu’il suffit d’avoir fait les 400 coups ensemble pour être les meilleurs amis du monde ? Combien de temps ça prend de se connaître par cœur ? À quel âge façonnons nous les liens les plus solides ? Partage de points de vue, d’expériences et questionnements, l’amitié est notre sujet du jour.

Sandra

J’ai toujours regardé avec beaucoup de curiosité et d’admiration les personnes qui semblaient se connaitre depuis 20, 30 ans…des femmes qui me racontaient des histoires avec des personnes qui étaient dans leurs vies depuis la maternelle alors qu’elles avaient déjà plus de 30 ans.

J’étais fascinée, non pas par les histoires mais par cette simple idée : « mais elles se connaissent depuis si longtemps », je trouvais ça tellement incroyable, ça réveillait en moi tellement de curiosité, d’interrogations et aussi je dois le reconnaître d’un peu de jalousie.

Je me disais que ce devait être si facile, si chouette d’avoir dans sa vie une personne, ou même un groupe, qui nous connait presque aussi bien que nous même, une personne qui était là depuis si longtemps qu’elle connaissait tous les recoins de notre vie, de ce qu’on avait vécu, traversé, de qui on était devenus….

Une personne avec qui finalement on n’avait pas besoin de se raconter, de raconter « sa vie » parce qu’elle avait toujours été là et qu’elle savait.

Cela me semblait facile, naturel, un peu comme si on n’avait rien à prouver, ni à démontrer, que c’était déjà acquis, puisque les liens avaient survécu au temps.  

Je ne sais pas si c’est le fait d’avoir changé de pays lorsque j’étais encore enfant qui a contribué à ce que je n’ai pas autour de moi de femmes que je connais depuis l’enfance, sans doute que oui, ma génération n’étant pas celles des téléphones, des mails, des Wathsapp, les seuls liens que j’avais pu nourrir l’étaient par quelques lettres.

J’ai longtemps pensé que c’était l’unique et la seule raison.

Sauf que je me souviens combien pendant si longtemps j’ai plusieurs fois pensé de moi que peut être je n’étais pas assez intéressante, que ma vie n’avait rien de cool, que je n’avais rien de spécial. Je ne pouvais que constater que les liens se faisaient et se défaisaient, que je ne ressentais pas mon cœur vibrer alors peut être que j’étais un peu inadaptée…

Et puis comme la Vie aime bien nous contrarier…ou nous surprendre.

Depuis quelques années, de nombreuses femmes sont entrées dans ma vie, certaines en fracassant des portes et d’autres plus timidement, certaines qui ne ressemblent en rien aux femmes que j’avais pu jusqu’alors côtoyer, des femmes qui n’avaient qu’avec seul point commun avec moi que de celui d’être une femme (et je crois que finalement celui-ci suffit). 

Ces femmes ont pris de la place, beaucoup de place et elles me font vivre et ressentir ce qui m’a durant toutes années fascinée.

C’est à ce moment précis que j’ai saisi ce que « Sororité » voulait réellement dire.

Elles n’ont pas besoin de tout savoir de moi pour me comprendre et pour m’écouter,

Elles n’ont pas besoin que je raconte puisqu’elles me sentent,

Je n’ai rien à prouver, je ne cherche pas à devenir pour plaire, je ne cherche pas à Etre ce que je ne suis pas pour qu’elles m’acceptent.

Et pui…je découvre que c’est bon aussi de raconter un passé, des souvenirs, de les revivre et de leur donner un peu vie à nouveau.

On valorise les liens qui traversent le temps et les époques, mais j’avais aussi envie de faire honneur aux liens qui se créent (ou se recréent) plus tard, bien plus tard et qui sont finalement tout aussi intenses, subtils, délicats, plein de maturité et de sagesse, mais aussi empreints de beaucoup de folie.

Clémence

J’ai rencontré des gens que j’avais l’impression de connaître depuis toujours…Mais dans mon cas, j’ai aussi des amis que je connais depuis le bac à sable. Et chaque moment passé ensemble nous ramène à des souvenirs d’enfance empreints d’insouciance. De nos plus grosses gamelles à vélo, nos pires profs, nos premiers amours, les prénoms de nos parents, en passant par les maisons dans lesquelles nous avons grandis. Et c’est vrai, c’est agréable d’avoir ces relations « doudou » dans lesquelles on peut panser les plaies de nos vies d’adultes qui n’ont parfois rien à voir avec ce qu’on imaginait devenir à l’époque. Un doux parfum régressif plein de tendresse innocente, mais qui se mérite… 

Si certaines relations traversent les décennies, elles traversent aussi les turbulences. Je ne crois pas aux liens qui nous unissent de nos 3 ans à nos 30 ans avec la même intensité. Car qu’en est il quand on quitte l’école ? Aspirés dans de nouveaux lieux, de nouveaux défis, avec de nouvelles personnes. Il faut créer les moments de retrouvailles. Provoquer ces rendez vous quand, avant cela on a jamais eu le temps de se manquer. Il faut sans cesse réapprendre à se connaître dans une période où, un peu perdus entre l’adolescence et l’âge adultes on ne comprend pas toujours les virages que certains prennent. Parfois on se perd de vue et Facebook devient le seul moyen pour « savoir ce qu’elle est devenue » enfin…si elle n’est pas mariée ou qu’elle a gardé son nom de famille. Parfois on ne reconnaît plus les gamins avec lesquels on a tant partagé et on choisi de se tourner le dos.

Et parfois on s’éloigne et on se retrouve. Je me souviens d’une amie du collège, à l’obtention de nos brevets nous avions le cœur brisé de devoir se quitter pour aller dans des lycées différents. On s’est promis juré qu’on ne s’oublierait pas, qu’on ne se lâcherait pas. Et on y croyait aussi fort qu’on se serrait dans les bras. Le temps est passé. On ne s’est ni fâché ni oublié mais on s’est éloigné. Vous connaissez la chanson du tourbillon de la vie ? On s’est connu, reconnu, séparé puis retrouvé ! Nous sommes aujourd’hui deux femmes pleines d’affection l’une pour l’autre qui ne se voient que quelques fois dans l’année mais profitent pleinement de chaque instants ensemble. 

En amitié comme en amour chaque relation qui dure doit accompagner l’évolution et les changements des uns et des autres. Sinon, c’est là qu’apparaissent les carrefours qui nous séparent. Entretenir une communication saine et efficace pour se comprendre, se connaître et se reconnaître dans tous nos états. Je pense sincèrement que mes relations doudou sont aussi importantes que les nouvelles, elles participent toutes à leur niveau à un certain équilibre. On y partage simplement pas les mêmes choses. On valorise les liens qui traversent le temps et les époques, mais j’avais aussi envie de faire honneur aux liens qui se créent (ou se recréent) plus tard, bien plus tard, et qui sont finalement tout aussi intenses, subtils, délicats, plein de maturité et de sagesse, mais aussi de beaucoup de folie.

On pense souvent à tort que c’est plus difficile de créer, de rencontrer, en clair de se faire des amis/amies à un certain âge…mais c’est faux, il suffit simplement de continuer à rencontrer, créer et reconnaître,
Et puis continuons à chérir les relations qui traversent le temps, qui durent, accordons leur de l’intérêt encore, donnons du temps et arrosons les pour les chérir.

Sandra&Clémence

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